Blog de Raistlin

Mon dernier blog n'est plus. Vive mon nouveau blog ! Vous trouverez ici mes écrits. En espérant que cela vous plaira. Bonne lecture !!

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Lieu : Picardie, France

vendredi, novembre 10, 2006

Chapitre 3 : On the road again …

J’étais restée catatonique devant le SMS de Lola pendant plusieurs minutes puis je m’étais mise à voler littéralement dans mon appartement, tourbillonnant d’une pièce à l’autre comme un Taz en furie. J’avais extirpé de dessus mon armoire, mon sac de voyage couvert de poussière, mais au moins pas de Curly dans ce coin là, le contraire m’aurait passablement inquiété. J’avais sélectionné à l’arrache quelques fringues parmi le fatras sans forme toujours étalé un peu partout dans ma chambre.

Sélectionner était un bien grand mot si l’on considérait que je piochais au hasard dans la pile de vêtement sans vraiment réfléchir. Le fait est que je n’avais pas vraiment le temps de m’attarder sur le choix existentiel de ma garde robe. Ce qui m’aurait d’ordinaire pris deux bonnes heures d’indécision et de crises de désespoir devait être aujourd’hui réglé en 30 minutes montre en main. Car je devais prendre le train de 11h30 qui partait de la gare St Lazare et il était déjà 10h00 bien sonnées. J’habitais Montmartre, dans le 18e et n’avais heureusement pas tout Paris à traverser en métro mais me connaissant, avec mon sens inné de l’orientation, il ne valait mieux pas que je traîne et je devais encore acheter mon billet. Autant dire que mon planning était serré, et je devais au plus tard avoir atteint le guichet de la gare pour 11h00 tout en tenant compte de la marge d’imprévus prévisibles qui tombaient irrémédiablement sur moi dans ces moments là.

Je fourrai donc au hasard dans mon sac, des sous vêtements de rechange, un petit pull col V au cas où le climat normand déciderait subitement de précipiter l’arrivée de l’automne en mon honneur, un jean usé que j’avais porté un ou deux jours durant la semaine mais qui ferait bien l’affaire, un vieux T-Shirt tout déformé, dernier vestige de mes années Bon Jovi et sur lequel on devinait encore le décalco délavé représentant le groupe à son heure de gloire, tout de cuir vêtus, cheveux longs et crêpés. C’était pour dormir de toutes façons.
Je fis un saut dans la salle de bain où j’enfournai machinalement toute une batterie de produits de beauté dans ma trousse de toilette qui s’avéra forcément trop petite pour contenir autant de flacons et tubes pourtant indispensables à mon voyage. Ne pouvant fermer complètement la fermeture éclair, je calai la trousse telle quel dans le fond de mon barda et, je croisai les doigts pour qu’elle ne déverse pas tout son contenu parfumé mais néanmoins collant dans mon sac pendant le voyage.
J’étais atterrée de voir que le strict minimum vital que j’avais pourtant rigoureusement sélectionné, débordait déjà de mon petit sac. Devant ce spectacle déprimant, j’hésitai à ajouter une serviette de toilette qui a coup sûr empêcherait la fermeture de la glissière. Un rapide coup d’œil aux aiguilles en forme de zig zag qui sautillaient sous le cadran de ma montre Kickers me confirma que je n’avais plus le temps de tout ressortir et de chercher un sac plus grand. Tant pis, dans un geste résigné, je rejetai l’épaisse serviette violette brodée à mes initiales, idée cadeau fort originale que j’avais reçu à mon dernier Noël et, je me rabattis sur ma paire de collants résilles préférée, ça pouvait toujours être utile et au moins ça ne prenait pas trop de place.

Je glissai mes pieds nus dans une paire de chaussettes noires et enfilais par habitude mes vieilles Docs au cuir élimé. Malgré les remarques incessantes et désagréables de Lola concernant ces chaussures, je refusais catégoriquement de m’en séparer, j’étais bien trop à l’aise dedans et puis je ne sais pas, elles me rappelaient une certaine époque et j’y tenais. Dans un élan de lucidité, je pensais à éteindre mon PC, à prendre mon chargeur de portable et, mon lecteur MP3 en priant pour que les piles fonctionnent suffisamment longtemps pour que je puisse l’utiliser dans le train. Un rapide et dernier tour d’horizon avant de partir puis j’enroulai un immense chèche autour de mon cou, j’étais facilement sujette aux angines. D’une main déterminée, je passai la sangle du sac sur mon épaule et sorti sur le palier. Au moment de tourner la clé dans la serrure, je me frappai le front avec la paume de ma main et rouvrit la porte. Je marmonnai dans ma moustache en attrapant rageusement mon sac à main que j’avais consciencieusement oublié et qui trônait sagement sur la commode dans l’entrée. J’étais irrécupérable !

Miraculeusement, j’avais attrapé le premier métro sans avoir besoin de courir, j’étais sortie à la bonne station et je n’avais même pas attendu plus de 15 minutes au guichet de la gare pour acheter mon billet. Le regard glacial que j’avais lancé à la vieille dame qui m’avait poliment demandé si je pouvais lui laisser ma place dans la file d’attente m’avait certainement beaucoup aidé mais je préférais ne pas m’attarder sur ce point. A la guerre comme à la guerre ! Je n’avais pas le temps d’être aimable et mon train était déjà à quai prêt à partir.

A présent, j’étais confortablement installée dans le train corail Paris-Deauville, à côté d’une grosse dame au mutisme spectaculaire qui faisait comme si je n’existais pas, m’enfonçant son coude dans les côtes et, face à un adolescent dégingandé, gigantesque, aux oreilles décollées dont les jambes interminables m’obligeaient à me tenir de travers pour éviter que nos genoux ne se touchent sans arrêt. Il me souriait d’un air niais sans s’excuser à chaque fois que sa jambe frôlait la mienne et je soupçonnais, légèrement dégoûtée qu’il le faisait exprès. Le wagon était bondé et je ne voulais pas chercher une autre place au risque finalement de me retrouver debout pendant les deux heures de trajet. Mais qu’est ce que tous ces gens allaient faire à Deauville, nom d’une pipe ?

Agacée, je feignis donc ostensiblement de ne rien remarquer et décidai d’ignorer dignement mes voisins de route. Je fouillai dans mon sac besace en croûte de cuir et trouvai finalement les oreillettes de mon lecteur MP3 coincées entre mon portefeuille Naf-Naf et mes Rayban. J’enfonçai soigneusement les petites pastilles de plastiques dans mes oreilles et pressai le bouton « ON ».
Alors que les tamtams entamaient leur mélodie chaude et rythmée, je laissai la musique couler comme une rivière sonore dans ma tête en ébullition. J’attendis impatiemment le premier riff de guitare et l’arrivée de la voix grave et si familière du chanteur. Cet improbable mélange musical agit sur moi instantanément, m’apportant paradoxalement un calme et une plénitude que contredisait bruyamment le tempo de la chanson. Il n’empêche, je me sentais bien, et prête à affronter ce qui m’attendait à Deauville. Je sortis mon téléphone portable pour envoyer un SMS à Lola, lui annonçant que j’avais bien embarqué à bord du Deauville Express et qu’elle avait intérêt à m’attendre à mon arrivée. Je cliquai sur « envoi » et les petites notes caractéristiques du téléphone portable brouillèrent quelques secondes les ondes de mon MP3.
« Message bien envoyé ».

Je m’enfonçai dans mon fauteuil et autorisai enfin mon cerveau à réfléchir, ce que je lui avais interdit depuis la lecture du dernier SMS de Lola. J’avais foncé directement à la gare sans me poser de questions et je ne pouvais plus faire marche arrière. Dans 2h00 j’allais débarquer sur les quais de la gare de Deauville et je n’osais me laisser aller à penser que j’allais peut être LE rencontrer là bas.

Je connaissais un peu Deauville pour y avoir travaillé un été pendant mon adolescence et même si ce n’était pas un petit village où tout le monde se connaissait, les gens qui participaient au Festival s’agglutinaient le plus souvent dans les palaces sur le front de mer et il suffisait de se balader dans les parages pour avoir la chance de croiser certaines stars du petit et du grand écran. Je fis la moue, ce n’était pas mon univers et mon expérience deauvillaise ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable, j’avais eu du mal à me sentir à ma place dans ce milieu de riches insouciants qui dilapidaient leur argent dans les casinos et les spas en se racontant leurs dernières vacances à Ibiza ou Palm Beach. M’enfin, je ne voulais pas me stresser d’avantage et je fermais les yeux pour savourer ce moment. Je calai mon chèche comme un oreiller sous ma joue collée contre la vitre et en quelques secondes je sombrai dans un semi sommeil bercé par le roulement régulier du train.

Deux prunelles bleus dansaient devant moi, au dessus d’une rangée de dents scintillantes impeccablement alignées. Une voix profonde résonna étrangement et un rire enthousiaste m’arracha un sourire irrépressible. Il se tenait sur une scène au milieu d’autres acteurs avec lesquels il jouait dans la série. Il souriait et se tournait volontiers à l’appel de son nom clignant des paupières sous les rafales de flashs incessants, tandis qu’une armada de photographes les canardait avec des appareils aux zooms démesurés.
Sérieux, je m’étais toujours demandé si c’était un concours entre eux, les photographes, à celui qui aurait le plus gros, le plus long, enfin … je sais pas, ça m’avait toujours fait marrer.
Subitement, je reconnus ma propre voix qui appelait son prénom, bêtement, comme tous les autres amassés au pied de la scène. Et pourtant, étrangement, il sembla percevoir ma voix perdue au milieu du brouhaha. Il tourna la tête dans ma direction, ses yeux scrutant la foule. Je m’étais tu, le cœur battant, bloquant ma respiration. Au moment où ses yeux accrochèrent les miens, je reçu comme une décharge électrique en plein cœur. Il me fixait intensément, sourd à présent aux appels des photographes qui s’impatientaient et criaient son nom de plus belle. Il ne souriait plus, les yeux rivés sur moi. Je contemplais son visage concentré et j’eu la certitude que c’était lui, l’homme de ma vie. Je ne pouvais pas me tromper. Un des acteurs près de lui, attira son attention en posant une main sur son bras et il se détourna juste assez longtemps pour que je m’esquive en me faufilant entre les silhouettes sans visage qui m’entouraient. Je ne me retournais pas pour voir s’il m’avait vu partir. J’essayais de me mettre à courir, je sentais que je devais fuir, m’échapper le plus loin possible de cet endroit mais quelqu’un me retenait par le bras, et me secouait. Je tentais de le repousser, demandant qu’on me laisse tranquille mais la pression s’accentua sur mon épaule et je sentais qu’on me secouait de plus belle.

Je repris brusquement pied dans la réalité, pour découvrir qu’un des écouteurs avait glissé de mon oreille pendant mon sommeil et que mon opulente voisine me secouait comme un prunier pour me réveiller. Je compris très vite malgré ses bougonnements inintelligibles mâtinés d’un fort accent du Nord, qu’elle était indisposée par le bourdonnement continu qui émanait de mon lecteur MP3. J’estimais pour ma part que c’était une faveur que je lui offrais en lui faisant découvrir ce groupe helvète fabuleux aux sonorités électro surprenantes. Mais elle ne semblait décidemment pas de mon avis et n’accepta de se renfermer dans son mutisme que lorsque j’eu enfin éteint mon appareil au son démoniaque.

Le géant aux feuilles de choux quant à lui, profita honteusement de l’incident pour étaler un peu plus ses jambes sous mon siège et pensant sûrement que c’était le moment de saisir sa chance, il se pencha vers moi pour me demander d’un air complice ce que j’écoutais. Je faillis exploser de rire en entendant sa voix haut perchée d’adolescent entrain de muer, qui jurait complètement avec son physique. Pourtant, je me retins en imaginant combien il devait souffrir de cette période de croissance ingrate qu’il subissait sans pouvoir rien y faire. Malheureusement pour lui, son genou qui se rapprochait dangereusement du mien me fit frissonner de dégoût et refroidit la minuscule parcelle de pitié que j’avais ressenti pour lui.

« Pourriez vous, s’il vous plait, ôter vos jambes de mon espace personnel. Je ne voudrais pas être obligée d’appeler un contrôleur. Merci. »
Sous entendu « Espèce de porc, tu peux virer tes sales pattes et arrêter de te frotter à moi sinon je crie au viol ! Vicieux ! »

L’adolescent me lança un regard ahuri et s’empressa de replier ses jambes sous son siège ce qui lui donnait un air encore plus crétin. Je hochai la tête satisfaite mais énervée, il m’avait gâché mon rêve cet imbécile.

Je laissai mon regard se perdre dans le paysage insaisissable qui défilait de l’autre côté de la vitre et je songeai tristement que de toutes façons ce n’était qu’un rêve. Un de plus. Pourquoi étais je venue à Deauville ? A quoi bon ? Franchement, il fallait que je fasse quelque chose contre mon moral en dent de scie qui avait pris la fichue habitude de n’en faire qu’à sa tête.

Je voulais juste être heureuse moi, je ne demandais pas grand-chose.



1 Comments:

Blogger Hazel said...

On prendrait bien ta place auprès de Wentworth. Tant qu'à choisir entre les prunelles bleues et les feuilles de chou, je laisse tomber la verdure ! Dommage qu'on retombe dans la triste réalité (Oh mince !!!) J'adore les images que tu utilises et ton sens de l'humour, je m'y retrouve vraiment !

samedi, 22 mars, 2008  

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